Sublime Côte d’Ivoire : entre ambition et réalités — le diagnostic critique du Dr Pascald Djadou

Lancée avec éclat pour hisser la Côte d’Ivoire parmi les cinq premières destinations touristiques du continent, la stratégie “Sublime Côte d’Ivoire” se voulait une vitrine du renouveau du tourisme national. Cinq ans plus tard, si la vision a permis un regain de visibilité internationale, plusieurs fragilités structurelles compromettent encore son plein impact.

C’est le constat dressé par le Dr Pascald Djadou, Docteur-Ingénieur en communication et management du tourisme et des loisirs, dans une analyse critique assortie de propositions de réforme.

Une vision ambitieuse, mais des fondations fragiles

La stratégie “Sublime Côte d’Ivoire” visait à doubler la fréquentation touristique pour atteindre entre 4 et 5 millions de visiteurs, créer 650 000 emplois et attirer plus de 3 200 milliards FCFA d’investissements dans les infrastructures et produits touristiques. Basée sur neuf projets structurants — stations balnéaires, circuits culturels et naturels, tourisme d’affaires et pôles régionaux — elle s’appuyait sur une forte campagne de marketing international. Ces efforts ont redonné confiance à certains investisseurs et offert au pays une meilleure visibilité dans les salons mondiaux. Mais selon le Dr Djadou, l’écart entre ambition et réalisme demeure considérable. Les objectifs fixés paraissent difficilement atteignables dans un environnement africain hautement concurrentiel (Maroc, Sénégal, Rwanda, Afrique du Sud). Les mécanismes de financement, eux, restent flous et les projets structurants tardent à se concrétiser.

L’un des Projets de rêve pour la stratégie “Sublime Côte d’Ivoire”

Une gouvernance éclatée qui freine la dynamique

La gouvernance du projet est l’un des points les plus préoccupants. Bien que pilotée par le Ministère du Tourisme et des Loisirs, la coordination avec l’office ivoirien du toure “ Côte d’Ivoire Tourisme“ souffre de rivalités internes. Ces tensions institutionnelles se traduisent par des chevauchements de compétences, des campagnes parallèles et une image confuse non seulement pour les opérateurs du secteur mais pour les partenaires internationaux également. Le Dr Djadou pointe également la lourdeur administrative et le manque d’agilité stratégique, qui limitent la cohérence globale de la promotion touristique ivoirienne.

Infrastructures et services : le talon d’Achille

Malgré les annonces, les infrastructures de base demeurent insuffisantes hors d’Abidjan et de quelques pôles comme Grand-Bassam ou Assinie. Les routes, la signalisation, les services publics de base et les dessertes aériennes intérieures freinent la mobilité des visiteurs par endroit. Quant à la qualité de service, nombre d’établissements n’atteignent pas encore les standards internationaux, accentuant le décalage entre la promesse marketing et l’expérience réelle du voyageur.

Une marque touristique à renforcer

Sur le plan de la communication, le label “Sublime Côte d’Ivoire” peine à s’imposer comme une marque forte. Le storytelling national manque de différenciation face aux destinations concurrentes, la segmentation des marchés reste faible et la communication digitale manque de constance. L’absence d’une stratégie de communication de crise renforce les perceptions négatives liées à la sécurité ou à la stabilité politique régionale.

Durabilité et inclusion : le maillon faible

L’ancrage communautaire et la durabilité environnementale restent insuffisamment intégrés. Les populations locales profitent peu des retombées économiques, tandis que la gestion écologique des sites demeure fragile. Pour le Dr Djadou, le modèle ivoirien doit impérativement associer les communautés riveraines, renforcer la protection des sites naturels et instaurer des mécanismes clairs de partage des bénéfices.

Sublime Côte d’Ivoire : 187 milliards de FCFA pour les “3 tours jumelles” du Plateau

Des recommandations pour un nouveau souffle

Pour corriger ces insuffisances, le Dr Djadou Pascald propose une refondation pragmatique du modèle touristique ivoirien. Parmi ses principales recommandations :

  • Aligner les ambitions sur les capacités réelles du pays, avec un déploiement progressif par phases régionales.
  • Mettre en place une politique nationale du tourisme claire et fédératrice, soutenue par un cadre de gouvernance unifié — par exemple, une Agence nationale du tourisme ou un Conseil supérieur du tourisme.
  • Professionnaliser le capital humain par un plan national de formation aux métiers du tourisme et de l’accueil.
  • Investir dans les infrastructures essentielles : routes, signalétique, hygiène, sécurité, connectivité aérienne et digitalisation.
  • Développer une stratégie marketing différenciée et durable, basée sur des récits identitaires régionaux et des campagnes numériques continues.
  • Renforcer l’inclusion et la durabilité environnementale, avec des audits réguliers et des normes écologiques contraignantes.
  • Assurer transparence et redevabilité par la publication de rapports publics et d’indicateurs de performance mesurables.

Vers des États Généraux du Tourisme ?

Dr Pascald Djadou
Docteur-Ingénieur en communication & management du tourisme et des loisirs

En conclusion, le Dr Djadou appelle à la tenue d’États Généraux du Tourisme en Côte d’Ivoire, rassemblant pouvoirs publics, opérateurs privés, collectivités, universitaires et communautés locales. Objectif : repenser collectivement le modèle touristique ivoirien, renforcer la cohérence institutionnelle et ouvrir un nouveau cycle stratégique capable de transformer “Sublime Côte d’Ivoire” en un véritable levier de développement durable et inclusif.

Par Dr Pascald Djadou
Docteur-Ingénieur en communication & management du tourisme et des loisirs
Analyse adaptée par la rédaction de REPTHOCI.net

Spread the love

2 réflexions sur “Sublime Côte d’Ivoire : entre ambition et réalités — le diagnostic critique du Dr Pascald Djadou”

  1. Les plus grandes réalisations touristiques (infrastructurelles et de communication) du pays l’ont été lorsque le tourisme avait un rattachement institutionnel à un très haut niveau (Ministère d’Etat, Haut Commissariat).
    L’une des rares études, exhaustive, sur le développement du tourisme en CI date des années 80. Elle croupit dans les archives du Bnetd.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *